Alice

La contrainte que je me suis fixée en entamant ce carnet était de travailler d'après une seule photo.
Celle-ci, noire et blanche, a été prise dans un camp de vacances en 1974; j'avais alors quatre ans.
 J'ai tenté à chaque page, à l'aide de la ligne, de la surface et de la couleur, en respectant les éléments principaux du modèle, de laisser venir les glissements induits par la répétition : la contamination d’un dessin au suivant, la matière nouvelle fournie par un dessin non conforme au modèle et qui résiste de par sa dissonance, l’agrandissement d’un détail qui fait tendre l’image vers une forme d’abstraction.
 La finalité de cette tentative d’épuisement d’une image étant d’en fournir une version réduite, simplifiée et " vivante ".
 Mais aussi simple soit-elle en apparence, à reproduire, à abstraire, une image produit toujours une autre image. Ainsi s’agit-il moins d’épuisement que d’allées et venues, de retours, de ricochets, de rapprochement, d’éloignement, etc.
 Alice m'a permis de constater ma maladresse pour ce qui est de " saisir " les choses, mais également de réaliser la possibilité qui m'était donnée de les transformer.
 De là vient sans doute une certaine charge narrative propre à ces variations de point de vue et de traitement.

The stress I set to myself when I began this book was to work with and from only one photo.
This is a snapshot made in a summer camp in 1974. I was four years old.
I tried on each page, using the line, the surface ans the colors, to "restore", to get back a reduced, simplified and vivid version of that pic.
But as simple as it may look, reproducing by abstracting is always giving another image.
Alice allowed me to see my awkwardness, in terms of "grasping" things, but showed me also the capacity I have to transform them, plastically speaking.
Hence, no doubt, a certain narrative charge appears, belonging to these variations of point of view and treatment


(technique mixte sur papier, 20x20cm, 152 pages, 2017)